
Lubumbashi a été, samedi 9 août 2025, le théâtre d’une conférence-débat animée par l’ASBL Congo Virtuose autour d’un thème percutant : « 65 ans après l’indépendance de la RDC : Qui est le bourreau de la RDC ? ». Trois intervenants de marque — Coutumier Salumu, Éric Cibamba et Me Patrick Odia — ont livré des analyses sans concessions sur les causes profondes de la crise congolaise, ouvrant la voie à des échanges particulièrement vifs avec le public.
Coutumier Salumu : les minerais congolais, propriété théorique mais exploitation étrangère
Ingénieur civil des mines et stratège lobbyiste, Coutumier Salumu a recentré le débat sur la question des ressources naturelles. Selon lui, bien que la Constitution reconnaisse la souveraineté de l’État sur les minerais, la réalité est tout autre : leur exploitation échappe largement au contrôle national.
Entre contrats léonins, opacité et mainmise des multinationales, il a dénoncé une « souveraineté économique fictive » et plaidé pour une gestion patriote et souveraine des richesses, au service du développement du pays.
Éric Cibamba : le rôle des médias dans la libération des consciences
Journaliste et analyste, Éric Cibamba a mis en lumière la responsabilité de la presse et des acteurs de l’information dans la lutte contre la désinformation et la manipulation. Il a rappelé que l’information fiable est une arme essentielle pour éveiller la conscience populaire et permettre aux Congolais de défendre leurs droits face aux injustices et à la prédation des ressources.
Pour Éric Cibamba, le « bourreau » de la RDC réside aussi dans la passivité citoyenne face à la manipulation des opinions.
Me Patrick Odia : une justice déséquilibrée et fragilisée
De son côté, Me Patrick Odia, a dressé un constat préoccupant : le déséquilibre dans la répartition des magistrats sur le territoire national, aggravé par des conditions de travail précaires et la faiblesse des moyens alloués à la justice. « La plupart des magistrats préfèrent rester dans les grands centres urbains comme Kinshasa, Lubumbashi ou Goma, où les infrastructures et le confort de vie sont meilleurs. Ce choix, compréhensible sur le plan humain, laisse cependant de vastes zones rurales sans un accès équitable à la justice », a-t-il déploré.
À l’en croire, cette situation favorise non seulement l’impunité dans certaines régions, mais contribue aussi à nourrir la corruption. Des salaires insuffisants, des moyens logistiques limités et des conditions de travail difficiles poussent certains magistrats à adopter des pratiques contraires à l’éthique. « La corruption n’est pas toujours un problème de moralité individuelle, elle est aussi le produit d’un système qui abandonne ses acteurs à eux-mêmes », a-t-il souligné.
Il a pointé la faiblesse des moyens, la précarité des conditions de travail et les salaires insuffisants comme facteurs favorisant la corruption. C’est ainsi, qu’il a appelé à un financement accru de la justice, à une meilleure répartition des magistrats et à un engagement ferme contre les influences politiques dans ce secteur clé.
Les interventions ont donné lieu à un débat houleux entre participants et orateurs, signe de l’intérêt suscité par le sujet et de la diversité des opinions. En clôturant la rencontre, le Coordonnateur de Congo Virtuose, Costa Tunda, a remercié chaleureusement les participants pour leur présence et leur engagement, tout en annonçant que d’autres rendez-vous seront organisés prochainement pour poursuivre la réflexion.
Junior Ngandu