Du 23 au 25 avril 2025, la ville de Lubumbashi accueille l’atelier de dissémination du rapport 2022 de l’Initiative pour la Transparence dans les Industries Extractives (ITIE-RDC). Il s’agit d’une étape cruciale pour la gouvernance du secteur minier, à l’heure où le pays se prépare à une évaluation internationale de sa conformité à la norme ITIE.
Dans la salle Arrupe, divers acteurs du secteur extractif, notamment les autorités publiques, les représentants des entreprises minières, les services techniques et les organisations de la société civile, réfléchissent autour d’un même mot d’ordre : transparence. Un exercice démocratique inédit : la dissémination du rapport ITIE-RDC 2022, dans un dialogue multipartite tendu entre attentes citoyennes et impératifs de bonne gouvernance.
À la tribune, Jean-Jacques Kayembe, coordonnateur national de l’ITIE-RDC, donne le ton : « La dissémination permet aux communautés directement affectées par l’exploitation minière de dialoguer autour des informations certifiées mises à leur disposition, et d’exiger des comptes au gouvernement comme aux entreprises ». Une ambition nourrie par le soutien du projet ENCORE, financé par l’IDA-Banque mondiale et piloté par le COREF, bras opérationnel des réformes des finances publiques en RDC.
Une évaluation imminente
L’enjeu est de taille. À partir du 1ᵉʳ janvier 2026, la RDC fera l’objet d’une nouvelle évaluation internationale, ou « validation », par les instances de l’ITIE. Un processus dont dépend la crédibilité du pays sur la scène extractive mondiale. Or, le rapport 2022, qui alimente ces ateliers, se veut un miroir fidèle des avancées – et des faiblesses – du pays dans la transparence des revenus miniers, un secteur qui génère plus de 90 % des recettes d’exportation.
Le format décentralisé de la dissémination est une première. Prévue initialement dans 18 villes, l’opération se déroulera finalement dans 14 localités, à cause de l’agression dans l’Est du pays. Mais à Lubumbashi, cœur battant du cuivre et du cobalt, l’ambition reste intacte : expliquer, former, impliquer.
Entre technique et pédagogie
Le rapport, dense et truffé de données, peut rebuter le citoyen lambda. L’ITIE-RDC en est consciente. Pour contourner cet écueil, ses équipes, appuyées par des représentants locaux de la société civile, ont opté pour une pédagogie active. « Il ne suffit pas de publier des chiffres, encore faut-il qu’ils soient compris et utilisés », souffle un expert du Secrétariat technique.
Au cœur des débats : les écarts entre paiements déclarés par les entreprises et recettes perçues par l’État, la traçabilité des flux financiers, ou encore l’implication des provinces dans la gestion des 15 % de redevances minières leur revenant. Autant de sujets que les participants sont invités à décortiquer, chiffres en main.
Un signal politique
La tenue de cet atelier à Lubumbashi n’est pas anodine. Dans une province où les tensions entre populations locales et opérateurs miniers sont récurrentes, l’ouverture des données et la redevabilité sont perçues comme des antidotes à la méfiance. « La publication seule ne suffit pas. Le débat public est indispensable à la gouvernance démocratique des ressources naturelles », martèle un acteur de la société civile.
La démarche s’inscrit dans un contexte où Kinshasa cherche à améliorer sa note dans les classements internationaux de transparence et à renforcer la confiance des bailleurs. La norme ITIE 2023, entrée en vigueur récemment, impose une exigence plus forte de publication proactive et de redevabilité.
À Lubumbashi, l’atelier s’achève sur une conviction partagée : la transparence n’est plus un luxe, mais une nécessité pour un secteur extractif congolais à la croisée des chemins.
Junior Ngandu