
Le gouvernement dit « d’union nationale » annoncé par le Président Félix Tshisekedi sous la houlette de Judith Suminwa, est désormais connu. Une équipe élargie, marquée par un savant dosage entre barons politiques, technocrates confirmés et nouveaux visages, qui traduit autant les équilibres fragiles du pouvoir que les urgences du moment.
Les intouchables et les revenants
Le casting surprend autant qu’il rassure certains camps. Jean-Pierre Bemba conserve un strapontin de prestige à la vice-primature en charge des Transports, tout en restant l’un des piliers de la coalition présidentielle. Adolphe Muzito, ancien Premier ministre et figure historique de l’opposition, fait un retour remarqué à la tête du Budget. À ses côtés, Jean-Pierre Lihau garde la Fonction publique, confirmant son rôle de rouage central de la modernisation administrative.
Sur le plan sécuritaire, pas de changement. À la Défense Guy Kabombo Mwadimvita, tandis que l’Intérieur Jacquemain Shabani, stratège politique réputé proche du président Félix Tshisekedi.
Des choix qui parlent à l’international
À la diplomatie, Thérèse Kayikwamba est maintenue aux Affaires étrangères, épaulée par Crispin Mbadu Panzu pour la Francophonie et la Diaspora. Ce tandem devra gérer à la fois l’image extérieure du pays et les tensions régionales persistantes, notamment à l’Est.
Guylain Nyembo, ancien directeur de cabinet du chef de l’État, passe de Vice-premier ministre, à Ministre d’état du Plan et de la coordination de l’aide au développement, poste stratégique pour négocier avec bailleurs et partenaires internationaux.
Un dosage politique millimétré
La présence de Patrick Muyaya à la Communication, Louis Kabamba Watum aux Mines et Aimé Boji à l’Industrie illustre la volonté de conserver des hommes de confiance sur les portefeuilles sensibles. En parallèle, des profils plus technocratiques comme Raïssa Malu à l’Éducation nationale ou Guillaume Ngefa à la Justice signalent un ancrage réformateur.
Avec plus de 50 membres — vice-Premiers ministres, ministres d’État, ministres, ministres délégués et vice-ministres — le gouvernement Suminwa II était attendu plus resserré. Officiellement, cette architecture permet de « répondre aux urgences » et de « garantir l’inclusivité politique ». Officieusement, elle traduit aussi la nécessité d’élargir la base parlementaire et de satisfaire des équilibres régionaux et partisans complexes.
Cap sur l’économie et la sécurité
Les priorités sont claires : restaurer la sécurité dans l’Est, maintenir la stabilité macroéconomique et amorcer les grands chantiers d’infrastructures. Daniel Mukoko, à l’Économie nationale, et Doudou Fwamba, aux Finances, devront composer avec un contexte budgétaire contraint, alors que les attentes sociales restent élevées.
Pour la Première ministre, ce remaniement est à la fois un acte d’autorité et un pari risqué. Entre figures imposées par le sommet de l’État, anciens rivaux réhabilités et technocrates choisis pour leur expertise, Judith Suminwa devra éviter les tiraillements internes et prouver que cette mosaïque politique peut produire des résultats tangibles.