Face à l’enlisement de la crise dans l’Est du pays et au regain de tensions diplomatiques, quatre figures majeures de la politique congolaise plaident pour une solution congolo-congolaise, fondée sur un dialogue inclusif et la souveraineté nationale.
Par-delà leurs différends passés, ils ont choisi de faire front commun. Dans une déclaration conjointe publiée le 30 avril, Moïse Katumbi, Joseph Kabila, Martin Fayulu et Delly Sessanga ont uni leurs voix pour appeler à un « dialogue national, inclusif et sans exclusion » en vue d’une sortie durable de la crise multiforme qui secoue la République démocratique du Congo.
Alors que les initiatives diplomatiques se multiplient – de Washington à Doha, en passant par l’Union africaine et la déclaration conjointe de Kigali du 25 avril entre la RDC et le Rwanda – les signataires estiment qu’aucune de ces démarches ne pourra aboutir sans une implication directe et centrale des Congolais eux-mêmes.
Une crise multidimensionnelle
Dans leur déclaration, les quatre leaders dressent un diagnostic sévère de la situation actuelle, qu’ils jugent aggravée par un traitement « superficiel » des causes profondes. Ils pointent une série de défaillances structurelles : dérives autoritaires, affaiblissement de l’État de droit, corruption généralisée, élections controversées et atteintes répétées aux libertés fondamentales.
S’y ajoutent, selon eux, des facteurs exogènes comme les incursions étrangères, la porosité des frontières et le pillage des ressources naturelles. Autant de maux qu’aucune solution extérieure, fut-elle bien intentionnée, ne saurait résoudre à elle seule.
« Seuls les Congolais peuvent identifier les racines de leurs problèmes et définir les remèdes appropriés », lit-on dans le texte.
Soutien à la CENCO et à l’ECC
Pour les signataires, l’initiative conjointe de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) et de l’Église du Christ au Congo (ECC) constitue aujourd’hui la meilleure voie vers une paix durable. Ils appellent la communauté internationale à soutenir cette démarche qu’ils qualifient de « légitime, inclusive et enracinée dans la société congolaise ».
Cette main tendue au clergé protestant et catholique traduit une volonté de dépasser les clivages politiques pour établir un véritable pacte national, fondé sur la concertation, la cohésion et le « bien vivre ensemble ».
Huit engagements pour un nouveau départ
Dans un document structuré en huit points, les leaders de l’opposition appellent notamment à :
une transparence accrue dans les accords économiques et de coopération ;
l’évacuation immédiate de toutes les forces étrangères et groupes armés non étatiques du territoire congolais ;
le retour sécurisé des déplacés et réfugiés ;
la restauration de l’État de droit, de la cohésion nationale et de l’indépendance de la justice.
Une union à observer de près
Si cette alliance peut surprendre – tant les trajectoires de ses membres ont divergé ces dernières années –, elle reflète un constat partagé : celui de l’essoufflement du pouvoir de Félix Tshisekedi face à l’insécurité persistante à l’Est, à la désillusion démocratique, et à une gouvernance jugée opaque.
Katumbi, Kabila, Fayulu et Sessanga, qui n’avaient jamais été réunis sur une plateforme commune, cherchent à peser de nouveau dans l’espace politique national et à repositionner l’opposition autour d’un projet républicain, transcendant les ambitions individuelles.
Mais cette convergence tiendra-t-elle dans le temps ? Les observateurs s’interrogent sur la solidité d’un tel attelage, où les rivalités historiques ne sont jamais loin.
Une chose est certaine : à l’heure où les lignes bougent à l’international, le message est limpide. Pour ces quatre poids lourds de la scène politique congolaise, aucune paix véritable ne pourra émerger sans un processus dirigé par les Congolais eux-mêmes, pour les Congolais.
La Rédaction