RDC : Le verdict du procès Constant Mutamba, une affaire à la croisée du judiciaire et du politique



Le verdict du procès de Constant Mutamba, ancien ministre de la Justice accusé de détournement de 19 millions de dollars, n’a pas eu lieu ce mercredi 27 août 2025, comme initialement prévu. La Cour de cassation a annoncé son report au 1er septembre, invoquant des « contraintes organisationnelles ». Une décision qui prolonge le suspense autour d’une affaire judiciaire explosive, scrutée de près par l’opinion congolaise et par la classe politique.

Un dossier hautement sensible

Au cœur du procès : 19 millions de dollars censés financer la construction d’une prison moderne à Kisangani, issus de l’indemnisation versée par l’Ouganda pour les victimes de la guerre des Six Jours (2000). Selon l’accusation, Mutamba aurait orchestré le transfert de ces fonds vers une société jugée fictive, Zion Construction SARL, dans le cadre d’un marché irrégulier de gré à gré.

Le ministère public a requis une peine exemplaire : 10 ans de travaux forcés, 10 ans d’inéligibilité, exclusion des fonctions publiques et privation de libération conditionnelle. Une sévérité justifiée, selon le procureur, par la gravité de l’affaire et la trahison des attentes des victimes de guerre.

Mutamba contre-attaque

Mutamba, 37 ans, clame son innocence et dénonce un « complot politique » visant à briser son ascension. Il assure que l’argent est toujours intact sur un compte bancaire, que le contrat avait été validé par la Première ministre Judith Suminwa, et que l’Inspection générale des finances était informée. Sa défense, forte d’une vingtaine d’avocats, plaide l’acquittement, soulignant la légalité de Zion Construction et contestant la procédure de levée de son immunité.

À l’audience, l’ancien ministre n’a pas hésité à se comparer à Patrice Lumumba ou Nelson Mandela, affirmant affronter un procès « téléguidé ».

Un verdict très politique

Le procès Mutamba dépasse le seul cadre judiciaire. Sympathisants mobilisés, dispositif policier renforcé autour de la Cour de cassation, climat électrique : chaque étape résonne comme un test pour l’indépendance de la justice en RDC. Le report du verdict, annoncé dans une salle sous haute surveillance, a encore alimenté les spéculations.

Pour les partisans de Constant, l’affaire illustre une instrumentalisation de la justice destinée à neutraliser une voix critique. Pour d’autres, ce dossier est l’occasion de vérifier si l’État congolais peut réellement lutter contre la corruption, y compris au sommet de l’appareil politique.

Une attente prolongée

Le verdict attendu le 1er septembre sera décisif. Une condamnation renforcerait l’image d’une justice prête à frapper fort contre les détournements, mais au risque d’alimenter les accusations de règlement de comptes. Un acquittement, en revanche, fragiliserait l’action du ministère public et relancerait les débats sur l’efficacité de la lutte anticorruption.

Dans tous les cas, l’affaire Mutamba restera comme un moment charnière : celui où la justice congolaise doit convaincre qu’elle agit au nom de l’intérêt général, et non sous pression politique.


La Rédaction

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