RDC–M23 : L’accord de Doha, une lueur d’espoir pour l’Est congolais


C’est un serrement de mains lourd de symboles qui s’est joué ce samedi dans la capitale qatarienne. Sous l’œil attentif des médiateurs qataris, du représentant spécial du président congolais, Sumbu Sita Mambu, et du secrétaire permanent de l’AFC/M23, Benjamin Mbonimpa, la République démocratique du Congo (RDC) et le mouvement rebelle ont paraphé une Déclaration de principes censée poser les bases d’un cessez-le-feu durable.

L’événement, soutenu par les États-Unis, l’Union africaine et plusieurs observateurs régionaux, s’inscrit dans le prolongement de l’accord de paix conclu à Washington le 27 juin entre Kinshasa et Kigali. Mais cette fois, c’est directement avec le M23 – acteur majeur de la crise sécuritaire dans l’Est congolais – que Kinshasa tente de tourner la page de plus de trois décennies de conflit.

Un conflit qui saigne l’Est depuis des décennies

Le décor est connu : Nord-Kivu et Sud-Kivu, terres de richesses et de souffrances, ravagées par des guerres à répétition depuis les années 1990. Le M23, ressurgi en 2021, a multiplié ses offensives début 2025, s’emparant de plusieurs localités stratégiques, dont Goma. Officiellement accusé par Kinshasa et l’ONU d’être soutenu par le Rwanda, le mouvement a provoqué un exode massif et aggravé une crise humanitaire déjà dramatique.

Si l’accord de Washington a jeté les bases d’une détente entre la RDC et le Rwanda, les rebelles tenaient à un accord direct avec Kinshasa. Doha, qui s’impose de plus en plus comme un médiateur africain de premier plan, a saisi l’opportunité.

Ce que contient la Déclaration de Doha

Le texte signé repose sur six piliers majeurs :

1. Un cessez-le-feu permanent, placé sous la surveillance de la MONUSCO et d’observateurs internationaux.

2. Des négociations accélérées : elles débuteront d’ici le 8 août 2025 pour aboutir à un accord de paix global le 18 août.

3. Restauration progressive de l’autorité de l’État dans les zones actuellement tenues par le M23.

4. Retour volontaire et sécurisé des réfugiés et déplacés, en coordination avec le HCR.

5. Respect strict des cadres juridiques nationaux et internationaux, y compris la résolution 2773 de l’ONU.

6. Implication des acteurs régionaux et internationaux, du Qatar aux États-Unis en passant par l’UA.

Pour Patrick Muyaya, porte-parole du gouvernement congolais, « les lignes rouges restent inchangées : pas de compromis sur la restauration de l’autorité de l’État ».

Entre espoirs et scepticisme

L’accord est salué comme une percée diplomatique par l’Union africaine et la MONUSCO. Mais les doutes persistent.

Le retrait des rebelles reste flou : Benjamin Mbonimpa parle d’un simple « gel des positions », loin des exigences de Kinshasa qui réclame un départ immédiat.

Les cessez-le-feu passés n’ont jamais tenu. Les affrontements sporadiques pourraient vite reprendre si la confiance ne s’installe pas.

Le rôle du Rwanda reste central : Kigali, accusé de soutenir le M23, sera scruté dans les semaines à venir.

Le calendrier est serré : un accord global en un mois alors que les causes profondes du conflit – intégration des combattants, partage des ressources minières, réformes sécuritaires – n’ont jamais été pleinement résolues.

Une paix encore fragile

Malgré ces incertitudes, Doha marque un tournant. En présence d’observateurs internationaux, le gouvernement congolais et les rebelles ont pour la première fois posé ensemble des jalons concrets vers la paix.

Reste à voir si cette volonté affichée se traduira sur le terrain. La prochaine étape cruciale sera l’ouverture des pourparlers directs le 8 août. D’ici là, tous les regards seront braqués sur Félix Tshisekedi et Paul Kagame, dont une nouvelle rencontre bilatérale est évoquée pour consolider cette dynamique.

Pour les habitants meurtris du Kivu, l’accord de Doha est une promesse. Mais une promesse que l’histoire récente les incite à accueillir avec prudence.


La Rédaction

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